Parterre de marguerites de Gustave Caillebotte
L’acquisition du « Parterre de marguerites »
Une restauration fondamentale décidée en 2020 par la nouvelle direction du musée des impressionnismes Giverny redonne au « Parterre de marguerites » de Gustave Caillebotte toute son ampleur et son originalité. Acquise en 2016 grâce à une souscription publique et au soutien généreux de nombreux mécènes, l’œuvre était jusqu’à présent exposée sous la forme de quatre panneaux, tandis que d’autres fragments du décor étaient conservés dans les réserves. De nouvelles recherches et la mobilisation d’une équipe de restaurateurs ont permis de les réunir et de les présenter pour la première fois au public, à l’occasion de l’exposition « Côté jardin. De Monet à Bonnard » (19 mai – 1er novembre 2021).
En 2016, le musée des impressionnismes Giverny présente dans l’exposition « Caillebotte, peintre et jardinier » (25 mars – 3 juillet 2016) quatre panneaux intitulés Parterre de marguerites, alors proposés sur le marché de l’art. Le musée lance alors, pour la première fois, une campagne de mécénat participatif afin de pouvoir s’en porter acquéreur. Grâce à la générosité de son public, mais aussi à celle de ses mécènes, le musée réussit à acheter l’œuvre.
Avant son acquisition par le musée, elle a longtemps été conservée roulée sur elle-même, avant d’être découpée. Ses différents morceaux ont été précieusement conservés. En achetant les quatre toiles présentées dans l’exposition, le musée a ainsi pu faire entrer dans ses collections trois autres petits panneaux et dix-sept fragments provenant du même décor.
La restauration
Une restauration fondamentale pour révéler le décor imaginé par l’artiste
En 2020, la nouvelle direction du musée décide d’une restauration ambitieuse, afin de redonner au décor de Gustave Caillebotte toute son ampleur. Le musée n’est pas seul dans ce projet : il bénéficie des conseils du C2RMF (Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France) et d’un comité scientifique créé à cette occasion.
La restauration a comporté plusieurs phases :
Les sept morceaux rectangulaires sur châssis ont été démontés, remis à plat, et assemblés avec les autres fragments, comme un immense puzzle, sur deux grands châssis.
Le vernis qui avait été appliqué sur certains fragments a été allégé, de façon à restaurer l’aspect relativement mat du décor de Gustave Caillebotte.
Les fragments manquants ont été remplacés par des morceaux de toile d’une épaisseur et d’un grain similaire à celle utilisée par Caillebotte, de façon à assurer la solidité de l’œuvre restaurée. C’est ce qu’on appelle le rentoilage.
Afin que l’œuvre soit plus facilement lisible et compréhensible par le public, deux types de réintégration picturale ont été choisis. Pour les fragments manquants qui étaient visibles sur les photographies d’archives, les restaurateurs ont reconstitué le motif des fleurs. Les lacunes pour lesquelles il n’existe aucune trace photographique ont été restituées en bleu ou en vert, selon leur position sur les panneaux reconstitués.
Ces réintégrations picturales sont visibles lorsqu’on s’approche du tableau : de légères différences de teinte permettent de ne pas les confondre avec les parties peintes par Caillebotte, tout en préservant la lisibilité de l’ensemble. Elles sont aussi réversibles et pourront être ôtées si des recherches futures mettent au jour des informations contredisant celles sur lesquelles sont basées les hypothèses actuelles.
L’emplacement originel
Les hypothèses sur l’emplacement originel du Parterre de marguerites
Comme Claude Monet, Gustave Caillebotte était un passionné de fleurs. En 1881, il fit l’acquisition d’une propriété sur les berges de la Seine, au Petit-Gennevilliers. Là il créa un magnifique jardin qui devint l’une de ses principales sources d’inspiration jusqu’à sa mort en 1894. Dans ses parterres richement fleuris et bien ordonnés, les iris, les roses, les marguerites, les dahlias et les chrysanthèmes se succédaient au fil des saisons. Il fit aussi construire une serre chauffée pour sa collection d’orchidées. Ces dernières lui inspirèrent des panneaux décoratifs pour les portes de sa salle à manger. Il est possible que le Parterre de marguerites ait lui aussi été destiné à l’une des pièces de la maison du Petit-Gennevilliers et qu’à travers lui l’artiste ait voulu faire entrer un peu plus son jardin dans son intérieur.
Les dimensions du décor restauré suggèrent qu’il pouvait couvrir la partie supérieure d’un mur, peut-être au-dessus d’un lambris. Le rectangle laissé blanc par l’artiste correspondrait à l’emplacement d’un élément de mobilier qui aurait masqué cette partie. Une hypothèse de reconstitution du décor a pu être établie sur la base de ces éléments.
Il reste toutefois des points non élucidés :
- Quel était l’emplacement originel exact de l’œuvre ?
- Pour quelle raison l’œuvre est-elle restée inachevée ? Était-ce une volonté de Gustave Caillebotte ou la mort prématurée de l’artiste a-t-elle interrompu la création d’un décor encore plus vaste ?
- Que représentaient exactement les morceaux manquants ?
Nul doute que l’œuvre a encore de nombreux secrets à révéler ! Le musée des impressionnismes Giverny entend bien continuer ses recherches et faire découvrir au public toute l’histoire de l’œuvre. Il travaille actuellement à un projet de reconstitution numérique immersive du décor, qui sera présenté au printemps 2022.
Un décor immersif
Le Parterre de marguerites : un décor époustouflant et immersif
Sa restauration permet au Parterre de marguerites de retrouver sa place dans l’histoire des décors impressionnistes, dont il constituerait l’un des derniers témoignages, dans les années 1890.
Encadrée par des bordures de liserons peintes à même la toile, l’œuvre associe la répétition décorative d’un papier-peint à la liberté de touche d’une œuvre impressionniste. Les marguerites, couchées par le vent et vues en plongée, donnent une hypnotique impression d’immersion dans la nature. Brossées à touches vives et énergiques, elles se détachent sur un fond vert qui évoque hâtivement, sans le décrire, leur feuillage. Les fragments désormais réassemblés, le mouvement qui parcourt le parterre n’en est que plus évident. L’effet ainsi obtenu est particulièrement vivant et ressemble à une vaste tapisserie végétale et mouvante.
Ce choix du motif des marguerites poussant au milieu de l’herbe, évoque la tradition japonaise, que les artistes français découvrent dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Les fleurs éparpillées sur la surface de la toile, vivantes plutôt que coupées, rappellent certains chefs-d’œuvre du Japon, peints sur des paravents et des cloisons coulissantes.
La modernité de ce décor végétal foisonnant n’avait certainement pas échappé à Claude Monet. Quelques années après le décès de son ami, Monet entreprit le grand projet de décoration des Nymphéas présenté aujourd’hui à l’Orangerie et dont le Parterre de marguerites annonce déjà l’audace dans la représentation de la nature.
L’avenir de l’œuvre
Une œuvre destinée à voyager, au gré des prêts
Le Parterre de marguerites, qui devient incontestablement l’icône de la collection du musée, est destiné à voyager. D’autres musées souhaitent ainsi exposer ce décor, si essentiel dans la carrière de Caillebotte. Prochain arrêt : le musée de l’Orangerie, qui présentera l’œuvre dans l’exposition « Décorations impressionnistes », du 1er mars au 11 juillet 2022.
Afin de la préserver, que ce soit lorsqu’elle est en réserve, accrochée dans les salles d’exposition ou en déplacement, un caisson climatique a été construit sur mesure pour elle ! A l’intérieur du caisson, l’œuvre est protégée des variations du taux d’humidité. Un verre de sécurité anti-reflet la protège des chocs, tout en permettant aux visiteurs de l’admirer.
Mais avant ces voyages à venir, le public pourra découvrir l’œuvre restaurée et s’immerger dans ce vaste décor au musée des impressionnismes Giverny, dans l’exposition « Côté jardin. De Monet à Bonnard », du 19 mai au 1er novembre 2021. Dans un accrochage inédit et unique, le musée y montrera la sensibilité des artistes impressionnistes et des Nabis face au jardin, d’Auguste Renoir à Claude Monet et d’Édouard Vuillard à Pierre Bonnard.
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